A jour passant

Christophe Mahy

A jour passant

La poésie de Christophe Mahy possède un charme qui l’apparente à celle de Pirotte ou aux premiers poèmes de Jaccottet, mais avec moins de notes assombrissantes. Elle est composée de courts poèmes, d’une écriture limpide et ténue, qui parlent comme à voix basse de la solitude, de l’absence et de la disparition inexorable des êtres et des choses que nous avons aimés. Ces pièces en vers libre à la mode d’aujourd’hui font montre d’une sensibilité à fleur de mot qui touche et imprègne immédiatement le lecteur. D’ores et déjà, ce jeune poète a une voix bien à lui, attachante et qui tranche en douceur dans la poésie actuelle.

Extraits :

En fait
rien n’est jamais
ni gagné ni perdu
Il reste juste
des arpents de bruyères
dans notre ligne de mire
quelques signes encore
que le jour nous adresse
et dont personne
ne se porte garant.

- 

Nous faisons confiance aux horloges
pour oublier peut-être
que la mémoire
répète à l’envi
que cette vie ressemble
Quoi qu’on fasse
À une salle

Des pas perdus

- 

Ce que nous cherchons aux
Aux heures de ciel et de lumière
Est sans nom

Oui nous voici proches du terme
Et nous n’irons plus bien loin
Car le ciel tremble
Sur les forêts

Ce que nous cherchons
Est sans nom
Et nous y sommes
Déjà

A quelques ratures près

Christophe Mahy
À jour passant
Éditions Gallimard / 2021

Paru le 6 janvier 2022

Éditeur : Gallimard

Poème
de l’instant

Ludovic Janvier

Bientôt le soleil

« Je ne cherche pas l’essor, l’oubli, la grâce, je sais qu’ils me sont impossibles. Et d’ailleurs je ne le voudrais pas. L’ange me fait peur. Non, je cherche la présence et le poids, ou plus exactement la présence me cherche, le poids me trouve, le poids sur moi de la lumière comme un mur, la présence à plein regard de la mer qui fait masse ou du feuillage hanté par le ciel. De sorte que les jours de timidité, ou de trop fort vouloir, je reste pris dans la glu du moment, prisonnier du trop plein jusqu’à la nausée. Les jours de décision, j’allais dire de légèreté mais ne te vante pas, je vois sortir de moi une réponse, plus ou moins claire, plus ou moins simple, plus ou moins forte. Content ? Non, jamais content. Mais, quand même, content. »

Ludovic Janvier, Bientôt le soleil, Flohic Éditions, 1998.