Autoportrait d’un autre
IL S’ÉTAIT TRESSÉ un masque de fougères qui, le matin même, était encore vert. À présent il était devenu sec et cassant, pauvre armure désormais incapable de le cacher. Les oiseaux plongeaient comme des poignards dans la succion des vagues. Il se rappelait l’accélération de la chute, l’écriture de l’eau autour de son corps. Ainsi était-il resté des heures étendu. Était-il vrai que l’île se fût formée de la sorte, il ne pouvait le dire. Il se rappelait seulement la lenteur après la chute, l’acquittement de la violence qui l’avait libéré, l’étreinte de la mer.
Cees Nooteboom, Autoportrait d’un autre, Traduit du néerlandais par Philippe Noble, Actes Sud, 1994.
Poème
de l’instant
L’amateur de billes et autres nouvelles grinçantes
Assis sur mon banc de bois, je ne suis sensible qu’à l’essentielle beauté du monde enfin palpable, à cette impression d’une harmonie si souvent dérobée…
Bernard Ascal, L’amateur de billes et autres nouvelles grinçantes, Éditions Rhubarbe, 2021.