Et moi, je rirai de votre épouvante

Valéry Molet

 Et moi, je rirai de votre épouvante

Illustrations de Baptiste Carluy

C’est comme s’il y avait ici des mots sculptés dans la pierre. Les phrases décoffrées d’un granit rose et noir dégommé par le vent. C’est comme s’il y avait là un cendrier vomissant sur la plage, une femme qui part et ne reviendra pas. Comme s’il y avait ici des parcours, des chemins parsemés de bouse, peut-être des synagogues, sans doute des anachorètes de la littérature.
Dans littérature, il y a rature. Comment saurions-nous l’ignorer ? Comment pourrions-nous ne pas entendre ce silence entre chaque mot, percevoir cet espace entre chaque phrase et ces blancs entre les lignes de l’écriture de l’horizon ?
C’est comme s’il y avait là des mots comme un chemin de pierres décoiffées par le temps, où l’on viendrait trébucher sur les cailloux pointus d’un réel inassouvi.
C’est comme s’il y avait ici des parcours jonchés de « Victor Hugo et les muses » cachés dans les bronzes d’un Auguste Rodin toujours inachevés, à la terrasse de la brasserie des jardins de l’hôtel Byron, un dimanche après-midi de novembre après dix-huit heures trente, saoul ou bien avant la pluie. . .

Valéry Molet est écrivain. Il est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages de poésies, romans, nouvelles et essais. Il dirige également les éditions sans escale (www.sansescale.com). Il vit et travaille à Paris.

Paru le 30 mars 2021

Éditeur : Unicité.

Poème
de l’instant

Brefs Déluges

C’est drôle ce qu’on arrive à faire
Avec un cintre
On peut le déplier, le tordre
En un petit cygne qui vogue sur l’eau

Sébastien Fevry, Brefs Déluges, Cheyne éditeur, 2020.