Etel Adnan

Polyglotte, passionnée, polymorphe, ainsi pourrait-on présenter Etel Adnam, artiste complète née en 1925 à Beyrouth et décédée en novembre 2021 à Paris qui maîtrisait à la fois le français, l’anglais, l’arabe et s’exprimait artistiquement aussi bien à travers la poésie que la peinture.

La liberté guidait également son pinceau et sa plume. « L’art abstrait, observait-elle, c’était l’équivalent à l’expression poétique ; je n’ai pas éprouvé le besoin de me servir des mots, mais plutôt des couleurs et des lignes. Je n’ai pas eu le besoin d’appartenir à une culture orientée vers le langage mais plutôt à une forme ouverte d’expression. »

Après des études de philosophie commencées en France, à la Sorbonne, études supérieures continuées aux États-Unis, au sein des universités de Berkeley et de Harvard, elle enseigne la philosophie de l’art dans ce pays, poursuivant, parallèlement, son travail d’écriture.

En 2020, le Griffin Poetry Prize récompense son livre Time écrit en français et traduit en anglais par Sarah Riggs.

Son activité de plasticienne, où naïveté et figuration cohabitent, est, elle, découverte tardivement. Elle sera couronnée par plusieurs expositions, la dernière en date est collective, elle s’intitule "Écrire, c’est dessiner" et s’apprécie du 6 novembre 2021 au 21 février 2022 au Centre Pompidou-Metz. Ses œuvres croisent celles de Pierre Alechinsky, Louise Bourgeois, Jacques Villeglé et dialoguent avec les pages de Rimbaud, Hugo, Artaud.

L’amour était un guide dans sa vie, il perçait partout, dans ses toiles éclatantes, dans Revenir à Yourcenar (L’Échoppe, 2018), véritable exercice d’admiration, dans Le prix que nous ne voulons pas payer pour l’amour (Galerie Lelong, 2015) où elle peut dénoncer le désamour de la Terre, "cette vieille histoire" et maintenir malgré tout son amour de l’Humanité comme du sentiment amoureux lui-même :

l’amour, sous toutes ses formes, est la chose la plus importante à laquelle nous soyons jamais confrontés, mais la plus dangereuse aussi, la plus imprévisible, la plus chargée de folie. Cependant c’est le seul salut que je connaisse.

Extrait

Nous avons besoin d’un buisson de roses sur le balcon
et que le téléphone ne sonne pas.

J’ai vécu uniquement par mes propres moyens, voilà
pourquoi je suis un fleuve.

La mort n’était ni chaude ni froide lorsqu’elle touchait
ta peau. La volonté n’est jamais affrétée, la matière est
frustrée par ses limites.

Je voudrais que tu me voies étendue sur l’empreinte
laissée par ton corps sur le lit, mais dans nos âmes la
chaleur t’appartient.

Nuit, Edition de l’Attente, Etel Adnan, 2017. Traduction de l’américain de Françoise Despalles.

Bibliographie

- Au cœur du cœur d’un autre pays, Tamyras, 2010. Traduction Eric Giraud.
- Là-bas, Éditions de l’Attente, Etel Adnan, 2013
-  Le prix que nous ne voulons pas payer pour l’amour, Galerie Lelong, Etel Adnan, 2015.
- Mer et brouillard, Éditions de l’Attente, Etel Adnan, 2015
- Écrire dans une langue étrangère, L’Échoppe, Etel Adnan, 2015.
- Nuit, Éditions de l’Attente, Etel Adnan, 2017. Traduction de l’américain de Françoise Despalles.
- Surgir, Éditions de l’Attente, Etel Adnan, 2019

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