Jules Laforgue

Jules Laforgue naît le 16 août 1860 à Montevideo, en Uruguay.

Au milieu du 19e siècle, comme bon nombre de Pyrénéens souhaitant participer au nouveau capitalisme conquérant, Charles Laforgue, ancien professeur de Lettres, décide d’aller tenter sa chance dans le secteur de la banque, à Montevideo. Il y part après son mariage avec Pauline Lacolley, fille d’un commerçant français. Émigrés, la position du père devenu associé à la banque Duplessis, permet à la famille Laforgues de vivre plutôt aisément. Elle s’agrandit rapidement. Lorsque Jules naît, il a déjà un grand frère, Émile. Ils seront finalement onze enfants.

En 1867, Jules, sa mère, ses grands-parents et ses cinq frères et sœurs, retournent en France et emménagent à Tarbes d’où est originaire le père. À partir de 1868, lui et son frère Émile sont pensionnaires au lycée Théophile Gautier de Tarbes. Jules y est assez bon élève. Il y rencontre notamment Théophile Delcassé de qui il restera proche.

En 1875, la famille s’installe à Paris, au 66 rue des Moines. Il ne la rejoint qu’en octobre 1876. Alors qu’il n’a que 17 ans, Jules assiste à la mort en couches de sa mère, âgée de seulement 38 ans. Son père déménage alors avec ses onze enfants au 5 rue Berthollet. Pourtant initialement proche de son grand frère étudiant aux Beaux-arts, c’est en sa sœur Marie que Jules trouve une vraie confidente.

De nature timide, Jules échoue à trois reprises au baccalauréat de philosophie, notamment en raison de son manque d’assurance à l’oral. Il se consacre alors à la littérature et à la lecture des poètes et des philosophes, passant près de cinq heures par jour en bibliothèque. Dès 1879, il collabore à la revue La Guêpe, éditée à Toulouse par des anciens lycéens de Tarbes. Il y produit des critiques ainsi que des dessins légendés au ton ironique. Ses trois premiers textes sont publiés à la fin de l’année 1880 dans la revue La Vie moderne dirigée alors par Émile Bergerat. C’est aussi en 1880 qu’il participe aux réunions littéraires appelée le « Club des Hydropathes » où se rejoignent notamment Alphonse Allais, Charles Cros, Émile Goudeau ainsi que bon nombre d’autres poètes tels que Stéphane Mallarmé.

Gustave Kahn a notamment écrit sur cette période : « Il avait un aspect un peu clergyman et correct un peu trop pour le milieu. […] Je l’avais un peu remarqué à cause de sa tenue, et aussi pour cette particularité qu’il semblait ne pas venir là pour autre chose que pour écouter des vers ; ses tranquilles yeux gris s’éclairaient et ses joues se rosaient quand les poèmes offraient le plus petit intérêt… Il m’apprit qu’il voulait se consacrer à l’histoire de l’art et il méditait aussi un drame sur Savonarole. »

C’est justement sur la recommandation de ce dernier et par l’intermédiaire de Paul Bourget, alors auteur à peine connu, que Jules devient secrétaire du critique et collectionneur d’art Charles Ephrussi. Ce dernier possède une importante collection de tableaux impressionnistes et dirige la Gazette des beaux-arts. Ce travail lui permet d’une part de développer son attrait pour la peinture, mais également de gagner 150 francs par mois. Il travaille à ce moment sur une étude portant sur Albrecht Dürer, que compte signer Ephrussi.

Le 18 novembre 1881, il part pour Berlin après avoir trouvé un poste de lecteur auprès de l’impératrice allemande Augusta De Saxe-Weimar-Eisenach grâce à Paul Bourget. Son départ intervient au même moment que la mort de son père. Il ne peut assister à l’enterrement de ce dernier et décide de partir tout en laissant sa part d’héritage à sa fratrie, encore bien jeune. Avant d’arriver à Berlin où il logera dans un appartement de trois pièces au Prinzessinen-Palais, situé sur Unter des Linden, il effectue une halte à Coblence au château de Stolzenfels.

Son travail consiste alors à lire à l’impératrice, deux heures par jour, les meilleures pages des romans français et des articles de journaux, comme ceux de la Revue des deux Mondes. Ce travail lui permet tout d’abord de gagner 9 000 francs annuel, mais également d’accompagner l’impératrice en villégiature de mai à novembre, et ainsi de voyager à travers l’Europe. Jules a aussi beaucoup de temps libre qu’il consacre à la lecture.

Le manque de contact avec ses amis français le pèse. Dans sa correspondance avec son ami mathématicien Charles Henry, il exprime le poids de l’exil, l’ennui et la mélancolie. Au cours de ces cinq années passées à Berlin, il rédige une série de textes sur cette même ville ainsi que sur la cour impériale. Quelques-uns seront envoyés à la Gazette des beaux-arts. En mars 1885, il publie dans la revue Lutèce quelques-unes de ses « complaintes » qui seront publiées ensuite par Léon Vanier, aux frais de Laforgue, et dédiées à Paul Bourget. Vanier, éditeur de Paul Verlaine, publiera également L’Imitation de Notre-Dame la Lune, toujours à compte d’auteur.

C’est en 1886 qu’il quitte son poste de lecteur. Le 31 décembre, il épouse, à Londres, une jeune anglaise du nom de Leah Lee, rencontrée quelques mois plus tôt. Lorsqu’ils rentrent à Paris, ils s’installent au 8 rue de Commaile.

Atteint de phtisie, son état de santé se dégrade rapidement et Jules meurt le 20 août 1887 à son domicile. Sa femme, atteinte du même mal, succombera le 6 juin 1888 à Londres.

Jules est inhumé au cimetière parisien de Bagneux.

Bibliographie

Poésie

  • Le sanglot de la terre ; le concile féérique, Éditions l’Escalier, 2011.
  • Les Complaintes, Flammarion, 1998.
  • L’Imitation de Notre-Dame la lune, avec Le Concile féérique, Des Fleurs de bonne volonté, Derniers vers, Éditions Gallimard, 1979.
  • Les Complaintes, Éditions Gallimard, 1979.
  • L’Imitation de Notre-Dame la Lune, 1886.
  • Le Concile féerique, 1886.
  • Les Complaintes, 1885.

Contes en prose

  • Moralités légendaires, Éditions Gallimard, 1977.
  • Moralités légendaires, 1887.

Publications posthumes

  • Quelques poèmes, enrichis de burins originaux de Jean Couy, 1958.
  • Anthologie poétique de Jules Laforgue, 1952.
  • Premiers poèmes, 1903.
  • Le Sanglot de la terre, 1901.
  • Derniers Vers de Laforgue, 1890.
  • Des Fleurs de bonne volonté, 1890.

Varia

  • Berlin, la cour et la ville ; une vengeance à Berlin, Éditions L’escalier, 2011.
  • Une vengeance à Berlin, nouvelle, L’Illustration, 7 mai 1887.
  • Berlin, la cour et la ville, préfacé par G. Jean-Aubry, 1922.
  • Stéphane Vassiliew, nouvelle, 1946.

Traduction

  • Feuilles d’herbe, (Leaves of grass), de Walt Whitman.