Les Fulgurés

Auteur : Pierre Drogi

Les Fulgurés

des étourneaux peu discrets
disputent encore entre les sureaux mûrs
ils controversent à propos
des corps et des lots
chaque mot est détaché
déposé comme un être
à tout hasard
réceptacle de la foudre
les bandes brunes du fond se voient le fond
se voit comme bandes brunes à la
limite des frondaisons .
une lumière éparpillée marbre le sentier
bossu est raviné (ravelé) lucarnes
ouvertes de tous côtés où glisse un
bout de fleuve .
s’achève d’elle-même
la fin des bouillons-blancs aspirés par la pointe
s’affirme le pullulement des chardons mûrs tapissant le sol de
leurs flocons agglomérés
en touffes herbues tombées du peigne
chaque lot est alloué à un corps
volée de moineaux francs dans les églantiers
en volée franche – pris dans les aulnes
martin-pêcheur sur sa ligne dérangé
flux lent de poussière et de flocons inexorable
grince un seul héron par-delà la raideur des arbres

Paru le 1er novembre 2022

Éditeur : Les Lieux-Dits

Poème
de l’instant

Ludovic Janvier

Bientôt le soleil

« Je ne cherche pas l’essor, l’oubli, la grâce, je sais qu’ils me sont impossibles. Et d’ailleurs je ne le voudrais pas. L’ange me fait peur. Non, je cherche la présence et le poids, ou plus exactement la présence me cherche, le poids me trouve, le poids sur moi de la lumière comme un mur, la présence à plein regard de la mer qui fait masse ou du feuillage hanté par le ciel. De sorte que les jours de timidité, ou de trop fort vouloir, je reste pris dans la glu du moment, prisonnier du trop plein jusqu’à la nausée. Les jours de décision, j’allais dire de légèreté mais ne te vante pas, je vois sortir de moi une réponse, plus ou moins claire, plus ou moins simple, plus ou moins forte. Content ? Non, jamais content. Mais, quand même, content. »

Ludovic Janvier, Bientôt le soleil, Flohic Éditions, 1998.