Ne pleure pas sur la Grèce
Auteur : Bruno Doucey

21 avril 1967, Athènes : des chars et des bruits de bottes, le coup d’état de la junte des colonels instaure une dictature militaire en Grèce. Les camps de concentration sont rouverts pour y jeter les opposants. Parmi eux le célèbre poète Yannis Ritsos. Pendant ce temps à Paris, un jeune homme perd la trace de l’étudiante grecque dont il est amoureux. Plongé au cœur de la préparation d’un Livre noir de la dictature, Antoine prend conscience de l’horreur fasciste à l’œuvre. En partant à la recherche du poète et de son amie disparus, c’est lui-même qu’il va trouver. Alternant le vécu de Ritsos, déporté sur l’île de Léros dans des conditions inhumaines, avec la quête de vérité d’Antoine, Bruno Doucey nous entraîne dans un roman émouvant et puissant, dont personne ne peut sortir indemne.
La valise serrée contre ses jambes, il avait laissé ses pensées prendre le large pour apaiser l’angoisse que faisait monter en lui la présence des militaires. Pas un carnet dans la valise, pas un crayon qu’on lui aurait immédiatement confisqué. Non, mais des poèmes par centaines, dans la tête et dans le cœur, que rien ni personne ne parviendrait à lui enlever. Quelle chance, après tout, d’avoir choisi la poésie, et non la peinture ou le piano ! Dans les camps, dans les prisons où on les jette, le peintre privé de toiles et de pigments vit un enfer, le musicien sans piano se voit amputé de la meilleure part de lui-même, mais moi, poète sans stylo, ni papier, de quoi me prive-t-on que je ne puisse trouver en moi ? Les doigts coupés, la langue arrachée, je continuerais à sentir la vibration du poème. Elle est la corde tendue de mes nerfs. Ma résistance.
Paru le 7 janvier 2021
Éditeur : Éditions Bruno Doucey
Genre de la parution : Prose
Support : Livre papier
Poème
de l’instant
Stèles
La cime haute a défié ton poids. Même si tu ne peux l’atteindre, que le dépit ne t’émeuve : Ne l’as-tu point pesée de ton regard ?
La route souple s’étale sous ta marche. Même si tu n’en comptes point les pas, les ponts, les tours, les étapes, - tu la piétines de ton envie.
La fille pure attire ton amour. Même si tu ne l’as jamais vue nue, sans voix, sans défense, - contemple-la de ton désir .
*
Dresse donc ceci au Désir-Imaginant ; qui, malgré toutes, t’a livré la montagne, plus haut que toi, la route plus loin que toi,
Et couché, qu’elle veuille ou non la fille pure sous ta bouche.